MALE GAZE / REGARD MASCULIN

Corps, Masculinités, Sexualités
Collège, Lycée

Note : cette fiche a été rédigée fin 2023.
L'annotation vidéo n'est pas proposée.

ANALYSE

Quelques questions après avoir regardé le montage vidéo et la vidéo "le Male Gaze, c'est quoi ?" (ci-dessus)

Qui regarde ? Dans l’image et hors image ?

Comment les femmes sont-elles filmées ?

Quels types de plans ? Détailler en vous aidant d'un LEXIQUE AUDIOVISUEL ; sont-ils indispensables (= qu'apportent-ils à l’intrigue ?)

Pour satisfaire qui ?

Les hommes sont-ils filmés de la même façon ? Quelles différences ?

La femme a-t-elle un rôle actif ? 

Quelles implications sur les représentations des femmes et des hommes ? De leurs relations ?

Quel rapport avec les violences sexistes ?

Quelles seraient vos propositions pour équilibrer les regards ?

Le "Male Gaze", c'est quoi ?

Le Male Gaze, théorisé par Laura Mulvey dans les années 70 à partir du cinéma hollywoodien (où les producteurs étaient des hommes et les cinéastes pour une écrasante majorité des hommes), est une théorie qui s’appuie notamment sur la psychanalyse. Nous avons privilégié ici une présentation « simplifiée » et actualisée qui fait écho aux problématiques liées aux représentations sexuées, tout particulièrement à la façon dont les femmes sont montrées/regardées ainsi qu’au principe de domination à l’œuvre dans ces représentations.

Ce « regard masculin » c’est à la fois celui du réalisateur, celui du héros masculin et celui du spectateur ou de la spectatrice sur la femme/actrice;  elle est objet de désir et de plaisir, offerte à leurs (nos) regards pour les (nous) satisfaire. 

La femme est vue à travers et pour le regard de l’homme.
Elle n’est pas sujet, mais objet de regard.

Et pendant longtemps, les spectatrices n’ont pas eu d’autres choix que d’adopter ce même point de vue, de s’en satisfaire, ce type de représentations objectivantes étant les seules connues et vécues.

L’œil de la caméra, l’œil qui regarde et qui donne à voir, est un œil patriarcal, reflet d’une société où la position dominante est occupée par les hommes ; 
dans le récit, l’homme a un rôle actif, il initie l’action, il est en mouvement et la femme un rôle passif, elle est mise en mouvement, elle assiste ou seconde, une répartition genrée « classique » qui continue à irriguer le cinéma, la publicité, les images en général.

Nous nous y sommes habitué.es, pire souvent, nous trouvons ça « normal ».

Heureusement, d’autres regards, d’autres histoires voient le jour accordant aux femmes le statut de sujet (voir plus bas le "Female Gaz"e).

« Lorsque nous voyons un film, nous voilà pris au piège d’un dispositif qui vise presque uniquement à satisfaire les pulsions voyeuristes des hommes (hétérosexuels) »,Laura Mulvey.


Ce « regard masculin » n’est bien évidemment pas le regard de tous les hommes, il appartient à un système plus général de représentations qu’il participe ainsi à faire perdurer.

Quelques exemples pour repérer le Male Gaze

La position des corps 

Un exemple parmi d’autres

Est-ce vraiment une position naturelle pour ouvrir le capot d’une voiture et vérifier le niveau d’huile ?

ou encore comme sur cette photo publicitaire pour un jeu vidéo

 

L’homme est de 3/4, tourné vers l’avant,  position dynamique avec le mouvement du bras ; la femme est aussi de 3/4, mais vers l’arrière (on voit son dos), ses épaules, tirées en arrière, mettent en avant sa poitrine ; le mouvement est celui de ses longs cheveux ; sa position, son regard sont provocants, ceux de l’homme évoquent la violence.

 

La tenue 

Talons hauts, corsage échancré, short, mini-jupe, rouge à lèvres… Même quand la situation demande mouvement ou confrontations, même au saut du lit ; dans de nombreux mangas, fesses, cuisses, gros seins débordent de mini-vêtements, les culottes sont apparentes, …

La télé-réalité en offre aussi de nombreux exemples, avec des jeunes femmes perchées sur des talons interminables dès le matin, maillot de bain minimal et maquillage élaboré.

Une hypersexualisation qui s’affiche à travers des corps irréalistes et/où des situations qui demanderaient franchement une tenue plus appropriée ; nudité sans fondement, ou, quand elle pourrait se justifier, seul le corps de l’actrice est exhibé.

Exemple (parmi beaucoup d’autres) dans le manga Fairy Tale


Le type de corps féminins valorisés

 

Elles sont grandes, minces, belles, blanches, jeunes… Taille fine, lèvres pulpeuses, longues jambes, fesses galbées, souvent les cheveux longs… épilées, lisses…
Chez Disney, l’œil est immense (plus large que le poignet !) , la taille et le cou ultra-fins, des proportions totalement irréalistes.

Voir : Dessins animés : sexy et minces, des héroïnes toujours plus stéréotypées

https://www.liberation.fr/culture/2017/10/31/dessins-animes-sexy-et-minces-des-heroines-toujours-plus-stereotypees_1606126/

Ici la taille est aussi large que le cou (Princesse Jasmine)

Et là, le poignet est moins large que l’œil.

La façon dont les corps sont montrés 

par morceaux : lèvres, seins, fesses, jambes en gros plan ; 

par un mouvement de panoramique vertical : on voit les jambes et la caméra remonte le long du corps, un regard de bas en haut ou l’inverse, qui mate, qui déshabille ;

la plongée : la caméra se substitue au regard de l’acteur (forcément + grand, dominant) et plonge vers le visage levé de l’actrice ou directement dans son décolleté ;

par un travelling qui accompagne le mouvement de l’actrice en se focalisant sur ses fesses et le mouvement de son bassin par exemple ; 

par le lumière qui éclaire différemment les acteurs et les actrices, notamment dans le cinéma dit classique où l'actrice se doit de rester belle en toutes circonstances et bénéficie de "flous artistiques" irréels ;


Et si les personnages masculins posaient comme le personnage féminin ?

Ici la femme (photo de gauche) est la seule à ne pas être présentée de face, sa position met principalement en valeur ses fesses et elle ne porte pas d’armes ; elle regarde vers l’extérieur alors que les cinq autres personnages vont vers l’avant.
Dans la photo de droite, ce sont les fesses des héros masculins qui sont offertes à nos regards alors que la femme est maintenant présentée comme une combattante.

Qu’est-ce que ça change à notre perception de la situation et des caractères des personnages ?

Male Gaze dans la publicité

Découpage des corps, positions aguichantes, voire avilissantes, cadrages… dans la publicité, le Male Gaze règne (nombreuses illustrations dans Genrimages).

Exemple avec Saint Laurent en 2020

 ou ce corps nu pour vendre un sac à main en 2022 (que fait-elle exactement avec ?)

ou en 2014 avec un corps sans tête assimilé à une voiture contrôlée….

En quoi le male gaze serait-il un problème ?

Une mise en scène qui érotise les corps des femmes pour satisfaire un regard masculin voyeur, les transforme en objet sexuel, les découpe en morceaux par différents cadrages en sélectionnant les morceaux les plus « appétissants » participe à un modèle du monde où l’homme est un prédateur qui domine la femme (mais pas ses pulsions). C’est pourquoi la prédominance du « male gaze » est un problème loin d’être anecdotique qui demande à être critiqué et contré par d’autres regards. Tout ce qui contribue à la valorisation d’un masculin dominant au détriment d’un féminin dominé participe à une culture du viol et de la violence genrée qui malheureusement ne faiblit pas. On retrouve d’ailleurs ce même type domination et ses conséquences violentes  dans le modèle masculin hétérosexuel par rapport au « sous-modèle masculin » homosexuel.

La représentation des scènes de viol ou de violences contre des femmes au cinéma et dans les séries est aussi très problématique puisqu’elle nous met la plupart du temps en situation de voyeu.r.euse. Nous ne sommes pas avec la personne violentée, nous la regardons être violentée, l’empathie est loin.

Par ailleurs, les corps valorisés dans ces images tendent à créer une norme physique inaccessible avec pour conséquences des conduites alimentaires dangereuses, du harcèlement contre les personnes "hors normes", de la chirurgie esthétique à outrance, un manque d’estime de soi…

Voir par exemple : Image de soi sur les réseaux sociaux

El les chanteuses qui montrent leurs corps ?

Nombreuses sont celles qui revendiquent de montrer leur corps comme elles le désirent, attitudes sexy et provocantes, gros plans sur différentes parties de leurs corps (notamment les fesses avec le twerk) qui peuvent reprendre les codes du mâle gaze : réappropriation ? marchandisation des corps ? perpétuation de la mise en valeur de la femme objet sexuel ? Il est difficile de trancher, car selon les chanteuses la situation est différente.  Les paroles des chansons peuvent nous aiguiller, certaines étant très revendicatrices.

Toutefois, le corps des femmes étant toujours largement plus commenté, critiqué, jugé, utilisé, objectivé que celui des hommes, le fait que dans ces cas, le contrôle de leur corps et de la façon dont il est montré soit assuré et assumé par les artistes elles-mêmes, est en soi une grande différence. C'est le cas notamment actuellement dans le Reggaeton avec certaines chanteuses ouvertement féministes.

Lire

En Amérique latine, les femmes s'imposent enfin dans le reggaeton

https://www.slate.fr/story/244511/feminisation-reggaeton-karol-g-becky-g-amerique-latine-feminisme-sexisme-machisme-musique-chanteuses

Féministe le twerk ?

https://www.lemonde.fr/m-perso/article/2023/06/15/feministe-le-twerk_6177807_4497916.html

7 clips de pop-stars féminines qui hyper-sexualisent les femmes

https://www.lebonbon.fr/paris/les-tops-culture/top-clips-video-musique-sexistes-pop-stars-feminines-sexualisent-feminisme/

A propos de Beyoncé : 

« - Un large pan de la société américaine, qui va des conservateurs de Fox News à certaines féministes, voient une contradiction entre ces revendications et les petites tenues portées sur scène ou dans ses clips…

Je pense que cela participe d'une nouvelle forme de féminisme, plus jeune, qui revendique le droit d'être sexy, sexualisée, d'exprimer ses désirs sans renoncer à ses prérogatives. Mais dans ses vidéos comme sur scène, ce sont ses choix, elle n'obéit à personne. Un clip comme Partition, qui a été critiqué pour la façon dont Beyoncé y met en scène son corps, est une extraordinaire manière d'interroger la nature du regard porté sur le corps des femmes, et particulièrement les femmes noires, dans la culture pop. »

source  https://www.liberation.fr/musique/2014/09/11/un-feminisme-qui-revendique-le-droit-d-etre-sexy_1098507/

A voir sur ARTE

Reggaeton, twerk et libération sexuelle : la révolution neoperreo

Que serait un « female gaze », un regard féminin ? Une propostion (controversée) d'Iris Brey



Pour Iris Brey, le "regard féminin" ne consiste pas à renverser le regard en objectivant les hommes, mais à construire un regard plus équilibré et égalitaire, qui autonomise chacun.e des protagonistes en le rendant sujet ; ce regard n’est pas genré, il peut autant être le fait de réalisatrice que de réalisateur sur des actrices et des acteurs.

Pour concrétiser son "female gaze", Iris Brey a établi une liste de plusieurs questions à se poser quand on regarde un film :

  • Est-ce que le personnage principal s’identifie en tant que femme ?
  • Est-ce que l’histoire est racontée du point de vue du personnage principal féminin ?
  • Est-ce que l’histoire remet en question l’ordre patriarcal ?
  • Est-ce que la mise en scène permet au spectateur ou à la spectatrice de ressentir l’expérience féminine ?
  • Si les corps sont érotisés, est-ce que le geste est conscientisé ?
  • Est-ce que le plaisir des spectateurs est produit par autre chose qu’une pulsion scopique ? (La pulsion scopique désigne le plaisir de posséder l’autre par le regard.)

(Source: https://www.celles-qui-osent.com/qu-est-ce-que-male-gaze/#:~:text=Ici, le male gaze incarne,tout habillé, la princesse dénudée)

Toutefois, on a pu reprocher à ce "female gaze" d'être essentialiste :

"Le male gaze n’a pas d’envers, il n’y a pas de female gaze ou de « regard féminin », c’est-à-dire de regard qui pourrait être pratiqué et exercé uniquement par les femmes pour les femmes dans l’ignorance des hommes et qui viendrait se substituer au regard masculin. Le male gaze implique une domination politique, historique et sociale au détriment des femmes, de la même manière que le sexisme est la disqualification du féminin et que le racisme est la disqualification du non-blanc. Ces propositions ne sont pas réversibles si le contexte demeure inchangé..." Emilie Noteris, qui préfère la notion de "regard féministe".
Voir aussi bell hooks et le "oppositional gaze" développé dans son article " The oppositional gaze. Black female spectators" .

Laura Mulvey elle-même reproche à la notion de female gaze d'être bloquée dans une binarité établie et imposée par le patriarcat : "... il est évident que le simple renversement d'une vision que nous dénonçons comme opprésssive n'est pas une solution politique" (Source)

Voir aussi la lettre ouverte de Teresa Castro : Cinéma : féminin masculin, les pièges du regard

L'industrie

Aussi, si l’industrie du cinéma et de l‘audiovisuel fait plus de place aux femmes, les récits auront plus de chance de s’ouvrir à la diversité des représentations et de la mise en avant de personnages de femmes autonomes qui ne se contentent pas d’être les faire-valoir de leurs partenaires masculins. Cela permettrait aussi de voir des modèles masculins qui sortent des clichés. 

En 2019, au cours d'un entretien (cité ici) , la cinéaste Céline Sciamma précise :

« Toute ma vie en tant que spectatrice, le cinéma masculin m’a demandé de m’adapter à lui. J’ai passé ma vie à aimer des films qui ne m’aimaient pas. Je ne suis pas essentialiste, je ne crois pas du tout qu’il y ait une spécificité du regard féminin. Mais puisque tout le monde a décidé de me mettre dans cette case et de me poser la question, alors allons-y ! Travaillons la question en profondeur, essayons de comprendre ce qui fait la domination du regard masculin, pourquoi on doit la subir et pourquoi on assigne en permanence les femmes à n’être que « des femmes ». Quand je lis que je fais des « portraits de femmes », ça me rend dingue. Ça ne veut rien dire. En revanche, oui, disons-le, il y a des conditions qui diffèrent quand on est une femme cinéaste. Ce ne sont clairement pas les mêmes budgets. On lit nos films différemment, on nous regarde différemment. Alors là, oui, il y a une identité « femme » au cinéma. Elle ne vient pas de nous, de notre identité profonde, mais de la façon dont l’industrie nous met dans une case. Je ne suis pas femme par la façon dont je regarde le monde mais par la façon dont irrémédiablement, on me regarde et on me renvoie à ça. »

Quelques chiffres sur l’industrie du cinéma

Ainsi, selon le rapport du collectif 50/50, en 2019 

la part des personnages féminins varie selon la présence ou l’absence de femmes engagées dans la création ;

les 7 films le plus financés cette année là ont été Intégralement réalisés/écrits/ produits par des hommes 

sur les 15 films le plus financés , 20% de personnages principaux femmes contre 80% d’hommes 


(source : https://collectif5050.com/wordpress/wp-content/uploads/2022/05/5050-Cinegalites-presentation-Assises-0512.pdf)

En 2023, le film de Greta Gerwig  Barbie est le premier long-métrage réalisé par une femme à dépasser le milliard de dollars de recettes (ce qui n’en fait pas un film féministe pour autant !).

Pour compléter

L’Observatoire de l’égalité Femmes-Hommes du CNC présente les principaux chiffres-clés de la place des femmes dans le cinéma et l’audiovisuel. (novembre 2023)

A voir sur ARTE

Réalisatrices à Hollywood, mission impossible ?

D’autres façons de satisfaire le regard masculin…

  • donner aux acteurs une partenaire beaucoup jeune… 

Nous nous sommes habitués à des écarts d’âge d’une bonne vingtaine d’années (parfois beaucoup plus)  entre les protagonistes masculin et féminin d’un film. L’inverse est rarissime sauf si la différence d’âge est justement le sujet du film, c’est à dire un problème.

17 ans séparent Daniel Craig et Léa Seydoux dans James Bond, 22 ans Romain Duris (47 ans) et Emma Mackey (25 ans) dans le film Tour Eiffel (2020) alors que leurs personnages respectifs dans la vie réelle n’avaient que 9 ans d’écart… et toutes les femmes du dernier opus Mission Impossible (2023) ont au minimum 20 ans de moins que Tom Cruise.

Les acteurs restent séduisants et désirables bien plus longtemps que les actrices,  une combinaison de jeunisme et de sexisme qui persiste au détriment des actrices à qui , passé la trentaine, on propose de moins en moins de rôles …
« … l’âge d’or des comédiennes françaises, si du moins on considère comme unité le nombre de films tournés, se situe en moyenne entre 24 et 32 ans. C’est au fil de ces huit ans que les actrices jouent le plus grand nombre de rôles (en moyenne, elles tournent 1,5 film par an), avec un pic entre 27 et 32 ans. Puis entre 32 et 48 ans, le nombre moyen passe doucement à 1 par an, avant de passer sous la barre du film annuel entre 48 et 70 ans. Chez les hommes, en revanche, le pic du nombre de tournages est atteint plus tard, à partir de 30 ans mais dure bien plus longtemps, jusqu’à… 58 ans. … »
Source  https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2018/05/19/l-apogee-de-la-carriere-d-une-actrice-francaise-dure-en-moyenne-huit-ans-contre-vingt-huit-pour-les-acteurs_5301525_4355770.html

Des inégalités que l’on retrouve dans la société où il semblerait que l’homme se « bonifie » en avançant en âge alors que la femme se doit de ralentir le processus de vieillissement, paraitre toujours plus jeune et rester mince et sexy (se reporter à toute la gamme de produits de beauté qui vont dans ce sens).

  • imposer aux sportives une tenue différente de celle des sportifs pour la pratique du même sport

Voi CORPS, VETEMENTS   et  SPORTS 

Mini-shorts, culottes apparentes, justaucorps échancrés, tenues moulantes…les protocoles vestimentaires validés par les différentes fédérations sportives sont très différents selon qu’ils concernent les femmes ou les hommes. Qu’est-ce qui légitime qu’en beach volley les hommes jouent en short et les femmes en mini-slip ?
Exhiber le corps des femmes, comme commenter à longueur de reportage la plastique de telle ou telle  plutôt que son talent ou encore laisser la caméra s’attarder sur des fesses ou des seins sont des comportements machistes qui participent au même phénomène d’objectivation des femmes et de sexualisation à outrance, toujours pour satisfaire un regard masculin supposément avide.

En 2024, un équipementier japonais a mis au point une matière bloquant les prises de vues utilisant des infrarouges, qui dévoilent les dessous ou les formes des corps... (source)

 

Le cis gaze

Un autre regard normé.Cis : Une personne cis est une personne dont le genre est en adéquation avec le sexe qui lui a été assigné à la naissance. Cis est l’abréviation de cisgenre.

Nous citons ici le travail de Charlie Fabre, (il), co-fondateur de Représentrans | Chercheur en études trans :

« À force de regarder des films centrés sur des personnages trans’, on constate assez rapidement certaines récurrences :

  • les personnages sont tous hormonés ou bien il s’agit de l’enjeu du film ;
  • tout le monde est hétérosexuel ;
  • les trans’ n’ont pas d’ami-e-s trans’ et vivent seulement entouré-e-s de cis qui souffrent de leurs transitions ;
  • les médecins sont omniprésent-e-s ;
  • les personnages détestent leurs corps ;
  • tout le monde est binaire ;
  • tous ces films sont des drames…

Écrire ces histoires et mettre en scène ces récurrences, cela donne une vision restreinte et souvent blessante de ce que sont les transidentités. Ces films découlent d’une vision ciscentrée, elle-même inscrite dans un système cisnormatif, c’est-à-dire qui défini la norme par défaut comme cis…
… Cette notion se base également sur les écrits de Nissa Mitchell, écrivaine et musicienne, et de Julia Serano, chercheuse et militante trans-bi. La première écrit en 2017, dans TransSubstantiation, que « le cis gaze fait référence aux moyens mis en oeuvre pour présenter les personnes trans’ comme si elles existaient uniquement pour satisfaire le voyeurisme des personnes cis et pour les divertir »1."

Source : https://representrans.fr/2020/11/02/le-cis-gaze-en-bref/

Voir aussi TRANSIDENTITÉS

Complément

Le test de Bechdel 

A effectuer sur vos films, séries du moment...

  • Y a-t-il au moins deux personnages féminins portant des noms ?
  • Ces deux femmes se parlent-elles ?
  • Leur conversation porte-t-elle sur un sujet autre qu’un personnage masculin ?

Conclusion

Non tous les hommes ne sont des prédateurs qui se repaissent d’images dégradantes de femmes qui seraient leurs victimes ; mais il demeure que nous sommes toujours dans une société patriarcale dont sont d’ailleurs aussi victimes de nombreux hommes.
Le male gaze, en tant que regard dominant, reflète et conforte ce patriarcat dont les conséquences en termes d’inégalités, d’injustices, de violences sont légion.
Ce regard dominant qui engendre abus et violences on l'a retrouvé récemment dans différents témoignages d'actrices ( et aussi de jeunes acteurs) violentées et abusées par des réalisateurs plus âgés profitant de leur position pour en faire "leur chose", sous le regard complice des un.e.s et des autres.

Il est nécessaire de proposer d’autres images, d’autres récits, d’autres façons de filmer et de construire des personnages, pas uniquement blancs, pas uniquement jeunes, femmes, hommes, transgenres, hétérosexuel.e.s, homosexuel.e.s, plus en accord avec le monde dans lequel nous vivons même si cela déplait à certain.e.s.

Un film à voir absolument

Brainwashed : le sexisme au cinéma
https://www.arte.tv/fr/videos/110260-000-A/brainwashed-le-sexisme-au-cinema/

"De Metropolis à Eyes Wide Shut en passant par The Breakfast Club, Il était une fois à Hollywood¸ After Hours de Scorsese ou même Titane, de Julia Ducournau, Nina Menkes analyse plus de 175 extraits de films sur une période allant de 1896 à 2020 en focalisant son attention sur les plans de femmes dans le cinéma de Hollywood (soit 80 % des contenus de "divertissement" diffusés à travers le monde) et d'ailleurs.
L'essayiste et réalisatrice déconstruit chaque scène à partir d'éléments invariables : la relation sujet/objet, le cadrage, les mouvements de caméra et l'éclairage, soit les quatre paramètres qui permettent d'établir la "position narrative d'un personnage". Elle fait ainsi apparaître une structure sexiste systémique dans l'ensemble de ces prises de vues, parfois même en décalage total avec le rôle attribué à l'actrice.
Hommes et femmes sont filmés différemment. De ce constat implacable et rigoureusement étayé, Nina Menkes met en évidence la réification des protagonistes féminines dans le cinéma, message plus ou moins conscient qui aboutit selon elle à un "langage commun de la culture du viol". Car dans l'immense majorité des cas exposés, les femmes sont montrées à l'écran comme objet du regard, souvent silencieuses, décorrélées de leur environnement, fragmentées à l'image (poitrine, fesses...) et réduites à une simple fonction sexuelle. Le ralenti, par exemple, est utilisé pour les filmer en tant que corps sur lesquels le regard s'attarde, tandis qu'au masculin on n'y recourt que pour des scènes d'action. Désormais confronté à la critique féministe, le milieu du cinéma ne semble pas prêt à se réformer en profondeur.
Fondée aussi sur l'une de ses conférences (Sexe et pouvoir : le langage visuel du cinéma) et sur les témoignages d'actrices et d'essayistes, à l'instar de Laura Mulvey (qui a défini en 1975 le "male gaze", le "regard masculin"), la démonstration de Nina Menkes crève littéralement les yeux (et l'écran). La réalisatrice revient également sur sa propre expérience de spectatrice soumise à son corps défendant au diktat du male gaze pour nous interroger avec acuité : comment réinventer la représentation des femmes ?"

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